Sunday, September 16, 2007

Semaine 5 : la forêt bicolore.

Et de cinq ! Je me répéterais à dire que le temps passe à toute allure, aussi n’y aurez-vous pas droit. Tout comme la précédente, cette cinquième semaine n’aura pas été comme annoncée. Tout comme la précédente, cette cinquième semaine aura vu son week-end phnom-penhois repoussé. Et Phnom-Penh attendra encore, quinze jours s’il le faut. Bref. Me voilà vous raconter tout ça depuis Kompong Cham, où j’ai trouvé un cyber qui marche mieux que le soi-disant meilleur de tout Phnom Penh. On n’arrête pas l’progrès. Ceci dit, que vous raconter pour cette semaine étrangement calme ? Ma « sortie » de la semaine aura été hier : nous sommes allés en moto à Oreang Ou, gros bourg situé à quarante kilomètres de Kompong Cham, au-delà du Mékong. La route est magnifique. Les dix premiers kilomètres, ce ne sont que des rizières et des palmiers à sucre à perte de vue, le tout configurant le paysage le plus cambodgien qui soit. Mais lorsque l’on tourne à droite (vous saurez tout) au kilomètre (à peu près) 10, ça change du tout au tout. Nous voilà plongés dans les plantations d’hévéas qui font la réputation de la province de Kompong Cham. Développée par les Français sous le Protectorat, la culture de l’hévéas a quelque chose de notre forêt landaise : des dizaines de milliers d’arbres alignés en long, en large, en travers, sur des milliers et des milliers d’hectares. La route qui traverse a pour seuls virages des angles droits. Le spectacle a quelque chose de déroutant (sans jouer sur les mots bien sûr). A chaque arbre son petit pot suspendu pour récolter le latex, qui sera bientôt du caoutchouc. Les entailles finissent par faire changer les troncs de couleur. A hauteur d’homme (plus trois marches d’escabeau parfois), les arbres changent de couleur, et la forêt s’en retrouve métamorphosée : elle est bicolore. Noire au sol (il semble que les cicatrices laissées par les entailles noircissent avec le temps), plus claire au-dessus: double couche. Après des kilomètres d’arbres blessés rectilignes, nous avons fini par arriver à Oreang Ou, où le diocèse a également un projet éducatif (un centre de jeunes étudiants que nous avons visité). Puis nous sommes repartis dans le sens inverse, sous des hallebardes.
Une chose que je pourrais brièvement vous décrire ce soir, c’est l’habitat cambodgien traditionnel. En tout et pour tout, le Cambodgien vit dans un maison, bien plus proche d’une cabane que d’un préfabriqué Bouygues. Cette maison, sur pilotis aussi bien pour se protéger des inondations, des animaux, que des mauvais esprits du sol, est bien souvent constituée d’une grande pièce à vivre, et deux autres petites pièces qui servent de chambre aux parents et aux jeunes filles. Lorsque le lit n'est qu'une simple paillasse, un ventilateur et une télévision font office de seuls « meubles ». S'il y a lit, il sera sans matelas. Sous la maison, c’est la cuisine, avec un foyer et quelques gamelles pour seuls indices. On prend les repas sur une grande natte, en commun, le tout se disant "niam bay", c’est-à-dire "manger le riz"... Autour de la maison, un espace, s’il n’est pas balayé à longueur de temps, se voit utilisé aussi bien en poulailler quand il y des poules, en pré à vaches quand il y a une vache (ou deux), en atelier de réparation, en terrain de saï (sorte de badminton, très populaire au Cambodge), ou en je ne sais quoi d’autre. Parfois, il y a un puits. Toujours, il y a des autels, disposés un peu partout, et destinés aux ancêtres, à l'esprit de la maison censé venir protéger ses habitants, aux génies, et au Bouddha bien entendu. Je pourrais m’étaler davantage, mais il faut que j’aille dîner. A l’évêché. Qui n’a rien d’une maison traditionnelle. Programme de la semaine 6:
- demain : inauguration d’une crèche Thmoh Peth, un village de la province.
- mardi : départ pour Sihanouk Ville, où il y a une réunion pour la Société St-Vincent-de-Paul. Retour prévu : jeudi.

Le carnet du jour: Julien est né, chez ma soeur Fabienne et mon beau-frère Rémi. Bravo !

Pensée de la semaine 5 : « Riz : trois lettres, comme dans le mot blé, mais entre ces deux nourritures fondamentales, il y a la distance de deux groupes de civilisations » (Michel Tournier, extrait de Petites Proses).

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